Sapiens : l’animal qui raconte des histoires

Il y a 70,000 -30.000 ans l’homo Sapiens, s’installe progressivement sur toute la surface de la terre et les premiers outils sont créés : bateaux, lampes à huile, arcs et flèches, aiguilles. Selon Yuval Noah Harari auteur de Sapiens justement, c’est durant cette même période qu’a lieu la révolution cognitive, qui permet aux premiers hommes de communiquer entre eux à travers un langage suffisamment souple, permettant un nombre infini de phrases avec des significations distinctes. Le principal effet d’un langage de ce type est de faire émerger ou de rendre possible la coopération flexible entre les humains d’un large groupe. C’est cette flexibilité du langage ainsi que cette coopération flexible qui caractérise l’homo sapiens et qui explique en grande partie sa colonisation progressive de la terre et la destructions d’autres espèces animales et…humaines. Il peut y avoir un certain degré de coopération entre les animaux. Mais l’homme est le seul animal a pouvoir utiliser le langage pour, comme le dit Harari « , « bavarder », »raconter des histoires ». Comme le font les animaux qui peuvent, par exemple, avertir de la présence d’un ennemi en émettant un son particulier, le langage humain peut transmettre des informations sur des faits avérés. Mais la particularité du langage humain, c’est qu’il peut communiquer des informations, sur ce qui n’existe pas, la réalité imaginée ou réalité fictionnelle.

Le langage permet alors l’émergence des mythes et des croyances. Le mythe commun rend possible le commerce, car ce sont toujours des mythes, des histoires inventées qui partagés, permettent la confiance, puis l’échange. Ainsi, l’économie, la religion, le capitalisme ne sont que des mythes partagés qui permettent à des groupes d’humain de coopérer. Nous ne pouvons coopérer que parce que nous nous racontons des histoires, sur Dieu, sur le capitalisme, sur les droits de l’homme, sur l’argent, sur la mort. Aucune de ces histoires n’est scientifique et pourtant, chacune fonctionne et fait avancer l’histoire. Dans quel but? Pour être plus heureux ? Il ne semble pas que l’on puisse dire avec certitude que les hommes d’aujourd’hui vivent mieux que leurs ancêtres chasseurs/cueilleurs. Selon Harari, plutôt le contraire. Il est à noter que l’historien déclare participer chaque année à une retraite de méditation de deux mois en Birmanie. Sans doute est-ce un moyen pour lui de mettre à distance toutes les pensées, croyances, toutes les histoires que lui-même se raconte. Cette retraite silencieuse, hormis les temps de repas, alterne toutes les heures marche et méditation de 3h30 du matin à 21h. Les difficultés inhérentes à ce rythme soutenu ne sont pas un obstacle car Harari constate que cette pratique lui permet de séparer l’essentiel du superflu dans son travail de chercheur. A noter aussi, dans son livre, une attaque en règle contre le mauvais traitement infligé aux animaux d’élevage par les humains. Sans doute, une indication sur notre rapport au monde présent et à venir, quand machines et algorithmes vont prendre la pas sur l’intelligence humaine, sujet de son livre suivant: Homo Deus.

Sapiens, une brève histoire de l’humanité, Yuval Noah Harari, 2015, Albin Michel
Lien : www.telerama.fr