L’espace de la créativité

La créativité ne se manifeste pas uniquement de manière active au sens habituel de l’action comme moyen vers une fin, un objectif. Cest aussi être une manière d’être, à l’opposé d’une manière de réagir.
Isabelle, une participante à un stage MBSR , médecin dans un centre médical, raconte un incident récent. Avec son accord, son nom ayant été changé, je reprends ici sont témoignage.
Elle est en consultation. Soudain la porte s’ouvre et, sans avoir frappé, un homme rentre avec un enfant dans les bras et manifeste agressivement son désir qu’on l’examine. Elle est stupéfaite. Isabelle ouvre simplement les bras, comme si elle invitait celui qui interrompt brutalement sa consultation à observer la scène. Mentalement elle pose la question « qu’est-ce qu’on fait? » L’homme reste un instant sans rien dire et sort du cabinet en refermant la porte.
Cet incident aurait pu être vécu uniquement comme une agression, comme une intrusion violente dans cet espace protégé dont il aurait fallu absolument se défendre. Isabelle, habituellement, aurait réagi verbalement avec violence. Violence qui l’aurait affectée et aurait laissé des traces. Il aurait été probablement difficile de redonner toute son attention à la personne qu’elle examinait initialement. A la place, elle est restée silencieuse, s’est donné l’espace pour observer ce qui se passait et, en conséquence et de manière spontanée, a invité « l’intrus » à faire de même. Pacifiquement. Un moment de retour au présent, sans jugement, un instant de pleine conscience qui laisse à la situation la possibilité de s’orienter naturellement vers une solution.
Le lendemain, Isabelle a pu revoir ce père et son enfant, dans le calme.
Qu’y a t’il à retirer de cette histoire? Pour Isabelle, son sens se manifeste peut-être de manière très intime et très personnelle. En reparlant de cet événement, elle nous dit qu’elle a ressenti une certaine fierté, la fierté qu’il y a à sortir de son schéma habituel de réponse agressive aux perturbations et aux invasion. .
Parfois, il n’y a pas grand chose à faire pour répondre de manière adaptée aux situations imprévues de l’existence. Il y a souvent une ou plusieurs alternatives possible pour chaque situation. Dans la résolution des situations de conflit, d’agression, de négociation, une très faible dépense d’énergie peut faire basculer favorablement la situation et inviter à une résolution pacifique.
J’ai en tête, un maître de méditation Tibétain lors d’une négociation pour l’achat d’une propriété qu’il voulait acquérir afin d’organiser des retraites. Durant l’échange concernant le prix, il est resté silencieux, sans bouger, et de lui-même, le vendeur a progressivement baissé le prix de vente. Il a dit plus tard qu’il avait trouvé la négociation extrêmement facile.
Le silence n’est pas le moyen universel pour traiter toutes les situations. Mais peut-être que le moment de silence avant la parole ou l’acte est la voie vers l’espace de l’adaptation, de l’écoute, l’espace de la créativité.